Compte rendu concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 4 mars 2018. Musika Orchestra Academy 2018. Mahler. Montabeltti. Prokofiev. Beatrice Uria-Monzon. Musika Orchestra Academy. Pierre Bleuse. Incroyable concert qui confirme que les rêves les plus fous sont réalisables. Musika Orchestra Academy saison 4 est une superbe réussite qui verra la salle entière se lever pour applaudir les musiciens et leur chef, Pierre Bleuse. Le début de l’aventure date de 2008 et les partenariats organisés à l’initiative de Pierre Bleuse permettent une première académie en 2014. L’Orchestre National du Capitole participe sous forme d’ateliers animés par les solistes de l’Orchestre. La Halle-aux-Grains, salle symphonique emblématique, est un lieu de concert privilégié. Le concert de fin de stage permet une confrontation aux véritables attentes du public. Voir ce concert est extraordinaire tant la connexion entre les musiciens et le chef est magnétique.
Pierre Bleuse avec douceur et bienveillance amène chacun à donner plus que ce dont il se croyait capable. Le son de cet orchestre formé en 8 jours est tout simplement incroyable. Le travail a dû être colossal. Le programme particulièrement exigeant pourrait paraître hors de portée en si peu de temps. Il n’en est rien et l’auditeur a été comblé.
L’Adagietto de la Cinquième symphonie de Mahler est un moment de noblesse et de beauté. Les cordes sont rondes, présentes et tous les pupitres sont équilibrés. Le jeu du harpiste est particulièrement pénétrant. Pierre Bleuse dose parfaitement les nuances, et les phrasés obtenus sont larges et sensuels. Abordant les Rückert-Lieder de Mahler, Béatrice Uria-Monzon s’aventurait loin de son répertoire d’élection. Elle aussi a pris des risques et une certaine tension était perceptible. Elle arrive à bien caractériser chaque lied, tout en ayant davantage mis en valeur le coté théâtral, que le repli intimiste. « Um Mitternacht » est le lied le plus abouti. La voix est sonore, le timbre attachant mais le souffle semble parfois un peu court et elle n’utilise pas assez les nuances piano attendues dans la partition. Voilà en tout cas un bel hommage de cette marraine de l’édition 2018. Le challenge d’un répertoire nouveau est relevé avec éclat par la mezzo-soprano.
Le risque assumé, c’est ça la vie !
Ensuite Pierre Bleuse n’a pas ménagé les jeunes artistes de l’orchestre (entre 14 et 25 ans) en les dirigeant dans la pièce au titre ronflant d’Eric Montabeltti. Pure musique officielle, post-Boulez oedipien, elle est ingrate à entendre refusant comme il se doit mélodie ou rythme repérable. Les associations de timbres sont sans nouveauté ni originalité. Cette musique atonale et arythmique sonne comme dépassée, déjà entendue.
A coté, les compositeurs du début du XXème siècle, Mahler et Prokofiev, dans ce programme, apparaissent tellement plus inventifs et originaux. La difficulté d’écoute est peu face à l’inconfort du jeu pour bien des musiciens. Pierre Bleuse est très attentionné et permet aux jeunes musiciens de s’en sortir très honorablement.
Pour finir ce concert en beauté, les huit extraits du ballet Roméo et Juliette de Prokofiev représentent un tour de force qui comble le public. Voir ces jeunes musiciens si attentifs et parfois un peu poussés à leurs limites est un grand moment. Les premières mesures sont absolument saisissantes. Il faut voir comment dans un moment délicat Pierre Bleuse encourage les violons à phraser encore davantage pour donner sens au discours musical. Et en même temps, il donne ainsi le temps au grand tuba tout derrière à l’orchestre, de rattraper le tempo et au timbalier de se caler, lui qui semblait trop rapide.
L’expérience leur apprendra que la profondeur de la salle est à prendre en compte. Mais quelle leçon à cet instant. La musique doit avoir une direction, le danger doit être affronté et dépassé. Le chef d’orchestre dans sa bienveillance accompagne au bord du gouffre sans se fâcher et permet de ne pas y tomber. C’est en ce sens que ce concert restera mémorable pour cette association de courage et d’énergie. Et Roméo et Juliette, héros si chers, ont été très présents dans ces extraits, leur jeunesse répondait à celle des musiciens de l’orchestre.
Pierre Bleuse en quelques mots a dit combien cet enthousiasme et cette audace des jeunes musiciens devront les accompagner toute leur vie. Et le bis sera peut être le moment le plus beau dans une extraordinaire pièce du compositeur mexicain Arturo Márquez : Danzón n° 2. Les musiciens, pendant qu’ils jouent ou pas, ont été transportés par les rythmes de danse endiablés et chaloupés osant le montrer au public. Qu’il est beau, l’enthousiasme associé au plus grand sérieux ! Vive Musika Orchestra Academy n° 4 et l’an prochain, nous serons là pour la Cinquième édition !
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Compte rendu concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 4 mars 2018. Musika Orchestra Academy 2018. Gustav Mahler (1860-1911) : Symphonie n°5 Adagietto ; Funf Ruckert Lieder ; Eric Montabeltti (né en 1968) : Vaste champ temporel à vivre joyeusement. Sergueï Prokofiev ( 1891-1953) : Romeo et Juliette, 8 extraits symphoniques ; Beatrice Uria-Monzon, mezzo-soprano ; Musika Orchestra Academy ; Direction, Pierre Bleuse.